Journal 2016

Tuesday, May 24, 2016

25 mai

Comment guérir d’un bon coup un hoquet tenace

Savez-vous ce qu’est la myoclonie phrénoglottique ? Tel un bon journaliste du troisième millénaire, le chroniqueur ­fainéant copie-colle Wikipédia, ­l’encyclopédie en ligne nous disant qu’il s’agit d’« un réflexe respiratoire caractérisé par une succession de ­contractions inspiratoires spasmo­diques, incontrôlables et involontaires des muscles inspiratoires (diaphragme, muscle intercostal ­externe, muscles scalènes, et parfois les muscles intercostaux parasternaux et les muscles sterno-cléido-mastoïdiens), concomitantes d’une ­inhibition des muscles ­expiratoires, suivies trente-cinq millisecondes plus tard d’une constriction (resserrement circulaire de la glotte) ».


Voilà, très clair… Enfin, il apparaît surtout clairement que la vulgarisation, c’est un métier ; donc, comme nous avons assez perdu de place, ­disons simplement que la myoclonie phrénoglottique, c’est le nom savant du hoquet.

Mais, tout comme il y a hockey sur glace et hockey sur gazon, il y a ­hoquet et hoquet. Celui qui passe au bout de quelques instants et celui qui s’installe dans la durée – des heures, des jours, des années, des décennies même, le record étant de soixante-huit ans –, le tenace, le coriace, qui résiste à tout, aux médicaments et aux méthodes de grand-mère. Vous pourrez demander qu’on vous effraye, stimuler votre pharynx, avaler deux cuillerées de sucre ou de la glace pilée, boire un grand verre d’eau, retenir votre respiration ou vous masser le sternum, rien ne changera : vous ferez toujours « hic ».

La solution est peut-être ailleurs, comme l’ont suggéré deux Israéliens dans une étude publiée, en 2000, par Le Médecin de famille canadien. Ces médecins y racontent l’histoire d’un homme de 40 ans qui avait mal au dos. Après avoir pris des anti-inflammatoires non stéroïdiens et vu un spécialiste des médecines dites alternatives, le tout en vain, il se décida, au bout de quelques semaines de souffrances, à consulter un vrai ­médecin, lequel lui injecta un petit cocktail de corticoïdes. Bien et mal lui en prirent. Bien parce que la douleur s’évanouit rapidement. Et mal parce qu’au bout de six heures se déclencha un hoquet persistant. Qui dura, et dura, et dura.

Aucun traitement médicamenteux ou folklorique ne fonctionna et notre homme devint anxieux, incapable de travailler ou de dormir. Après quatre jours de hoquet, il advint que ce brave garçon décida d’avoir un rapport sexuel avec son épouse (« Je crois – hic – chérie – hic – que ça va – hic – me faire du bien »). Pendant le temps, non précisé, que dura la chose, notre pauvre sujet continua de hoqueter, et l’étude ne dit pas non plus – manque de curiosité déplorable – si ces spasmes perpétuels furent un plus dans cette activité déjà assez spasmodique. En revanche, il est écrit noir sur blanc que, lorsque l’éjaculation survint, le hoquet disparut d’un seul coup. Un an plus tard, il n’était toujours pas revenu.

Les médecins non plus n’en sont pas revenus. Jamais ils n’avaient vu un cas pareil et jamais la littérature scientifique n’en avait parlé. Le mystère reste entier sur le mécanisme qui a bien pu couper l’arc réflexe du hoquet. Dans leur conclusion, tout en se demandant si la méthode pourrait aussi fonctionner chez les femmes, les deux auteurs de l’étude tentent de rester pragmatiques : « Si un rapport sexuel avec un partenaire s’avérait impossible, la masturbation pourrait être tentée comme un moyen de stopper un hoquet réfractaire. » On imagine déjà l’ordonnance du médecin. La bonne nouvelle, c’est que rien ne sortira des bourses de la Sécurité sociale.



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